Petite visite au village autogéré de la Ganzau (et retour)

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Ils sont français, allemands, belges, marxistes, léninistes, anarchistes, anticapitalistes, altermondialistes. Ils se promènent tout nus ou masqués jusqu'aux sourcils et dressent fièrement leur majeur vers l'hélicoptère de la gendarmerie (ou est-ce la presse?) qui survole le village autogéré de la Ganzau, où se sont retranchés les altermondialistes opposés au sommet de l'OTAN.

 Pour s'y rendre, il faut traverser le Neudorf puis le Neuhof, là où les scooters font fi de la couleur des feux. Au bout d'une petite route qui longe la forêt de la Ganzau, un grand champ accueille des centaines de tentes et de chapitaux, les drapeaux multicolores "PEACE" ont un doux frou frou et flottent au vent aux côtés des drapeaux rouges et noirs. Dans le village, les ateliers trilingues (français-anglais-allemands) de tous ordres se succèdent : formation accélérée de secourisme (faire un massage cardiaque, réagir aux gaz lacrimogènes...), ateliers de "désobéissance civile" non-violente (comment prendre d'assaut pacifiquement un checkpoint, entrer en zone interdite illégalement, comment faire face à un CRS sans violence...), formation de nudisme protestataire etc.

On se promène d'un stand à l'autre : le parti marxiste léniniste de Marseille propose des brochures gratuites et vend des T-shirts rouges et noirs, l'Humanité est à prix libre, on trouve les oeuvres complètes (en version abrégée et photocopiée) de Marx, Lénine, Mao et même Staline, la revue "Le drapeau rouge", l'alliance France-Népal (c'est-à-dire le comité de soutien à la guérilla marxiste qui oeuvre pour le bonheur du peuple népalais). Tout ça fleure bon l'anticapitalisme d'ultra-gauche et le bon vieux temps de l'Internationale des damnés de la Terre (d'ailleurs un petit groupe d'Allemands nous distribuent des tracts qui soutiennent la 5eme...)

La presse n'est pas la bienvenue : les journalistes papier-radio-TV sont  systématiquement refoulés à l'entrée des châpiteaux sous lesquels se déroulent les formations : ils n'assisteront pas à ce jeu de rôle qui consiste à faire le CRS, le passant, le manifestant ou le journaliste pour "gérer une situation critique".

Après cette petite promenade dans le village, nous quittons le champ en passant devant les toilettes sèches et quelques encagoulés qui cherchent des pierres (pour la grande manifestation de demain?). Les hélicoptères font du vol stationnaire. Sur la route qui traverse le Neuhof, nous nous arrêtons à un feu rouge.
Devant nous, deux camionnettes de CRS. On s'y est habitué. Sauf que cette fois, il en descend plusieurs hommes avec leurs lance-grenades et leurs boucliers (photo). Ils rejoignent d'autres CRS qui se regroupent. On comprend pourquoi : un peu plus loin, un gros nuage gris, une rumeur, et des coups de feu (des pétards de manifestant ou des grenades assourdissantes de CRS?). On fait demi-tour pour contourner la charge imminente. Sur les ponts qui séparent le Neudorf de Strasbourg intra-muros, d'autres policiers veillent. Un camp militaire entouré de barbelés, quelques camions, partout. Tout ça devrait dégénérer rapidement. Qu'en sera-t-il demain?


Le checkpoint de la Place Ungerer (perdu dans un quartier résidentiel très tranquille derrière le pont de la Dordogne) fonctionne plutôt bien : le filtrage est impeccable. Il suffit d'avoir son badge et de montrer patte blanche après avoir fait un détour de vingt minutes pour contourner le pont. Des CRS tout sourire, bien courtois. Rien à voir avec leurs collègues en train de charger la racaille anarcho-terroriste du Neuhof et de la Ganzau !

 

BC

Publié dans Sommet de l'OTAN

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